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L'art d'interviewer

Il y une distinction principale entre la recherche entreprise pour réaliser un reportage journalistique et la recherche que l'on fait en vue de rédiger un exposé scolaire ou un rapport à l'intention de sa patrone. C'est que les journalistes cherchent absolument à interviewer les gens : ça leur permet d'obtenir de l'information directement des gens concernés.

Lorsqu'une journaliste chevronnée interviewe quelqu'un, on dirait que ça lui vient tout naturellement. On a l'impression qu'elle est là à bavarder avec une grande amie.

Mais derrière l'apparence d'une simple conversation, il y a une technique précise. La journaliste a fait de la recherche sur le dossier en question, en consultant des personnes-ressources et des documents de toutes sortes, et en situant le dossier dans un contexte plus large. Ce faisant, elle a pu déterminer le genre d'information qu'elle va maintenant rechercher auprès de la personne qu'elle veut interviewer. Puis, elle dresse une liste de questions à lui poser.

Il faut concevoir l'interview comme une conversation où l'on poursuit un objectif précis. On n'est pas là pour le simple plaisir d'échanger avec quelqu'un -- on veut quitter l'interview ayant en main les réponses à des questions spécifiques.


La préparation de l'interview
Est-ce que, lors d'un concert scolaire, tu oserais entrer sur la scène en chantant sans connaître la mélodie ou les paroles de la chanson? Il est fort probable que non - à moins que ton but soit de faire rire les spectateurs! Il en est de même avec une interview : l'on n'entre jamais dans une situation d'interview sans une préparation adéquate.

1. Commence par te renseigner sur le sujet en faisant un peu de lecture

  • Fais des recherches sur l'Internet ou à la bibliothèque.
  • Feuillète le journal pour des articles pertinents.
  • Renseigne-toi sur l'historique du dossier, sur ses derniers développements et sur les attentes relatives à lui.
  • Serait-ce pertinent de t'informer sur l'évolution de ce dossier dans d'autres villes, d'autres provinces ou pays?

2. Décide du thème central de ton reportage

  • Qui faudra-t-il interviewer?
  • Qui peut nous renseigner sur les faits et les statistiques?
  • Qui nous aidera à connaître le côté humain du dossier?
  • Écris les questions que tu veux poser à la personne interviewée.

3.Comment fixer le rendez-vous
Téléphone à la personne que tu désires interviewer. Demande-lui si elle peut t'accorder une interview en personne. Ceci est préférable car c'est ainsi qu'on peut observer les expressions et les gestes de la personne et qu'on peut voir son lieu de travail ou encore où elle habite.

Ceci dit, il y aura des occasions où tu ne pourras pas rencontrer la personne faute de temps, ou parce que la distance en question est trop grande. Dans de telles circonstances, l'interview se fait par téléphone. Précise au début de la conversation téléphonique que tu aimerais faire une interview et utiliser les commentaires de la personne dans un reportage.

Comme dernier recours, tu peux interviewer les gens via le courrier électronique. Mais souviens-toi que la langue parlée n'est pas tout à fait pareille à la langue écrite, alors tu pourrais te retrouver avec des citations qui ne semblent pas très naturelles ou spontanées. De plus, en envoyant une liste de questions à la personne, tu lui cèdes le contrôle de l'interview : elle peut décider de répondre à certaines questions et d'ignorer d'autres, ou d'adresser une question particulière de façon superficielle. Par contre, quand tu fais l'interview en personne, tu peux tout de suite faire le suivi d'une réponse en demandant des précisions.

Le journaliste Mathieu Turbide discute de l'arrangement d'une interview dans une enregistrement vidéo que tu peux visionner en cliquant la photo ci-contre. Mathieu Turbide

4. Comment poser les bonnes questions
Ton but, comme intervieweur our intervieweuse, c'est d'inciter une autre personne à parler ouvertement, à communiquer de l'information pertinente ainsi que ses opinions.

Il y a certaines questions qui te faciliteront la tâche et d'autres qui la rendront plus difficile. Voici des questions typiquement posées par les journalistes:

Les questions ouvertes encouragent la personne à parler, et à divulguer leurs opinions et leurs sentiments relatifs à une question quelconque. Ça leur permet de donner leur point de vue ou de raconter leur histoire sans qu'il soit nécessaire de les pousser à continuer à tout moment. Par exemple, voici ce que tu pourrais poser comme question au garçon qui a sauvé sa petite soeur qui se noyait dans la rivière:

« À quoi as-tu pensé en voyant que ta soeur éprouvait de la difficulté dans l'eau? »

Tu invites ainsi le garçon à raconter l'histoire du sauvetage. Il est fort probable que cette question-là provoquera une réponse plus intéressante et complète que ne le ferait la question suivante:

« Cela a dû t'effrayer de voir que ta soeur éprouvait de la difficulté dans l'eau, n'est-ce pas? »

On dit de la deuxième question qu'elle est fermée, probablement parce qu'elle n'aide pas la personne interviewée à s'ouvrir aux autres! Normalement, les questions fermées incitent la personne à répondre avec un simple « oui » ou « non ». Remarque que ce genre de question pourrait convenir à certains moments de l'interview. Elles t'aident à obtenir de l'information critique et une réponse définitive. Exemple:

« Monsieur Leloche, est-ce que vous avez pris l'argent de la petite caisse du secrétariat de l'école? »

Ainsi, Monsieur Leloche devra répondre « oui » ou « non », réponse qui est essentielle à la rédaction de ton récit.

Plusieurs reporters croient qu'ils doivent se montrer acharnés, presque aggressifs, lors de l'interview dans un effort de pousser les gens à répondre à leurs questions. Mais le contraire est souvent vrai. C'est là où les questions neutres s'avèrent utiles. ne question neutre est directe. Elle ne contient pas ton opinion sur le dossier. Tu ne présumes pas connaître la réponse d'avance.

« Madame la directrice, pourquoi est-ce que l'école a décidé d'annuler le bal des finissants cette année? »

Cette question est plus efficace que la question suivante:

« Madame la directrice, pourquoi avez-vous gâté les célébrations des finissants en leur enlevant leur bal? »

La deuxième question est tendancieuse - elle indique que tu as déjà parti pris, que tu as déjà tendance à voir les choses d'une certaine façon. Cela peut mettre la personne interviewée sur la défensive; elle peut même contester ta question -- et cela ne t'aidera pas à obtenir une réponse à ta question!

Les reporters posent souvent des questions à deux volets afin de profiter le plus possible de l'unique occasion de parler qu'on leur accorde lors des conférences de presse, ou afin de tirer le maximum de leur interview. Mais souvent ces questions à deux volets ne donnent pas le résultat escompté. En voici un exemple:

« Monsieur Giroux, est-ce que les étudiants pourront utiliser leurs planches à roulettes dans le stationnement de l'école l'année prochaine et pourquoi est-ce que l'école doit embaucher des gardiens et gardiennes de sécurité pour superviser le terrain de l'école après les classes? »

Il est possible que Monsieur Giroux n'ait pas entendu les deux questions et qu'il se contente de répondre à l'unique question qu'il a saisie. Ou, peut-être choisira-t-il intentionnellement de se limiter à une seule question, répondant à celle qui lui semble la plus facile. Dans ces cas, le reporter doit tenter de nouveau d'obtenir une réponse à la question négligée. Il est préférable de poser chaque question séparément afin d'obtenir des réponses complètes.

Vers la fin de l'interview, on pose souvent des questions qui aident à résumer l'information obtenue. Ainsi, on s'assure d'avoir bien saisi l'ensemble de l'information pertinente avant de terminer l'interview -- plutôt que de remettre en question une fois assis devant l'ordinateur. Voici trois questions qui nous aident à vérifier qu'on a bel et bien obtenu l'information nécessaire avant de clore l'interview.

«Y a-t-il autre chose que j'aurais dû vous demander? »
« J'aimerais m'assurer que j'ai tout saisi....»
« Alors, si j'ai bien compris, il y a trois questions principales à cette affaire....»


5. L'enregistrement de l'interview
Quand il s'agit d'enregistrer l'interview, tu as trois options. Tu peux prendre l'information en note dans un cahier, tu peux enregistrer avec un magnétophone ou encore tu peux enregistrer avec un appareil vidéo.

 Voici quelques conseils pour bien prendre en note les réponses, si tu choisis cette option:

  • concentre-toi sur la personne interviewée et sur ce qu'elle dit;
  • écris les détails importants aussi vite que possible;
  • utilise des abbréviations, des codes et des symboles pour transcrire les réponses, selon la méthode qui te convient le plus, personnellement, car c'est toi qui devra déchiffrer tes notes par la suite;
  • lis tes notes aussitôt que possible après l'interview pour te raffraichir la mémoire;
  • après l'interview, remplis les blancs que tu t'es permis pour aller plus vite en prenant tes notes; sinon, quelques heures ou jours plus tard tu risques d'avoir oublié ce que tu prenais pour acquis dans ton système de « sténographie » .
  • Tu peux également essayer d'enregistrer l'interview avec un magnétophone tout en prenant quelques notes. Ainsi, tu peux te concentrer sur les réponses de la personne plutôt que sur le processus d'enregistrement comme tel. Avec cette méthode, tu prends des notes de façon sélective, transcrivant les réponses spécifiques que tu aimerais citer ou indiquant dans ton bloc-notes les sections de l'interview où la personne mentionne un fait important. Ces notes t'aideront plus tard à repérer les extraits critiques de la bande sonore pour obtenir la citation ou les détails exacts.

 

 

 

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