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Entrevue sur le viagra avec la sexologue-psychologue Christine-Reynaert

David Warland, David Houbeau et Michaël Corman
Institut Don Bosco
Verviers, Belgique


L’arrivée du Viagra doit-elle être considérée comme providentielle pour l’harmonie au sein de certains couples?

On oublie trop souvent que l’amour se fait à deux. Or, les causes des pannes sexuelles masculines peuvent être de l’ordre psychologique et relationnel. La façon de réagir doit donc se trouver à deux. Et cela implique de la communication et de la complicité au sein du couple. Le Viagra peut être prescrit comme « starter », joint à une redynamisation du dialogue entre les partenaires. Ce serait notamment le cas pour des couples qui oublient trop souvent de réalimenter le côté érotique de leurs relations et qui tombent dès lors dans la monotonie.

L’homme victime de pannes dues à son anxiété de la performance va-t-il aussi se retrouver dynamisé?

Tout à fait. Nombreux sont les hommes qui, pour une raison ponctuelle, ont un jour une panne. Anxieux, voire fustrés, ils anticipent négativement l’étape suivante. Le phénomène devient alors récurrent. Ils risquent, grâce au Viagra, de retrouver la confiance. Ce bénéfice secondaire ne nécessitera pas une prise du médicament par la suite.

La compagne ne risque-t-elle pas de considérer la prise de cette substance comme une trahison?

C’est l’une des raisons pour laquelle la communication doit accompagner la prise de Viagra. Certaines femmes vont effectivement se dire : « Il prend un médicament donc il ne m’aime plus, » ou alors: « S’il a besoin de cela, c’est qu’il a une maîtresse! » Par contre, d’autres vont se dire qu’il est très positif que leur mari soit soucieux de l’harmonie conjugale et ose dès lors prendre un médicament.

Toutes ces subtilités sont l’apanage des sexologues et psychologues. Or, les généralistes peuvent prescrire le Viagra...

Je considère cela comme positif. Depuis trop longtemps, la sexualité a été perçue négativement, notamment depuis l’arrivée du Sida. Les généralistes étaient peut-être trop tenus à l’écart de l’intimité du couple. Grâce au Viagra, ils vont pouvoir se perfectionner en sexologie, en urologie et en psychologie. Ils vont revenir au contexte affectif et relationnel du patient, et donc s’informer sur cette matière passionnante.

C’est quand même un pas de plus de la science dans le couple...

La science est au service du patient. Or, les gens trouvent la sexualité effrayante et n’osent pas en parler. Grâce au Viagra, ils le feront peut-être un peu plus volontiers. Et de manière positive. Faire l’amour, c’est bon pour la santé, et trop de gens en sont privés.

Ne faut-il redouter certains excès dans la prise du Viagra?

Le stéréotype veut que l’homme soit adepte de la performance et du visuel. Certains pensent que l’arrivée de cette molécule risque de faire resurgir le « mythe de l’homme bien membré » et du "malentendu homme-femme" puisque cette dernière est en général plus attentive à la dimension affective. Je ne le pense pas. Espérons que le Belge moyen ne se situe pas dans les divisions qui ne sont plus celles des populations méditerranéennes ou américaines.

Et chez les jeunes?

Je ne crois pas qu’ils vont abuser. Ils vont l’essayer par curiosité ou pour rigoler. Mais je ne pense pas qu’ils vont tomber dans une sorte de toxicomanie.

Le Viagra serait-il donc la panacée pour les couples?

Certainement pas, car son taux de réussite avoisine les 70%. Pour les hommes chez qui il n’opère pas, le blocage antérieur risque d’être encore plus mal perçu. Par contre, certains couples vont reparler des problèmes sexuels enfouis et vont peut-être connaître une seconde jeunesse, alors que d’autres peuvent s’attendre à des crises si la difficulté sexuelle camouflait d’autres conflits.

Convient-il de parler de « révolution Viagra »?

Pas d'une révolution mais d’une rencontre de l’offre et de la demande. Nombre de patients nous parlent de problèmes d’insomnie et de troubles cardio-vasculaires qui masquent des pannes sexuelles. Ils seront soignés. Mais le Viagra n’agit que sur la phase d’érection, pas sur le désir. Donc, prescrit avec une phase de réflexion, il peut presque convenir à une large gamme de difficultés sexuelles, organiques ou psychologiques.



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